ONDERNEMEN // 20.04.2018

Le cautionnement en droit français : comment préserver les droits du créancier belge ? / borgstelling naar Frans recht : hoe de rechten van de Belgische schuldeiser vrijwaren ?

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Ingeval Belgische vennootschappen zaken doen in Frankrijk met Franse bedrijven, gebeurt het nogal eens dat zij leningen toestaan aan hun Franse zakenpartners. Zij zijn dan vaak geneigd de terugbetaling van hun lening veilig te stellen door een borg die alsdan is onderworpen aan Frans recht. De Belgische schuldeiser moet er evenwel zorg voor dragen dat de borgstelling niet wordt geannuleerd op grond van het Frans consumentenrecht. Om dit te vermijden geniet het de voorkeur de borg te laten stellen door een handelsvennootschap in plaats van door een natuurlijk persoon. In geval de borgsteller dan toch een natuurlijk persoon zou zijn, wordt de borg best gesteld middels tussenkomst van een notariële akte.


Le cautionnement est un acte très courant dans la vie des affaires transfrontalières entre la France et la Belgique, destiné à garantir le remboursement d’une créance. On le rencontre préférentiellement en droit bancaire : la banque prêteuse sollicite le cautionnement de proches du débiteur, afin de garantir le remboursement d’un prêt d’argent. Mais le cautionnement est également utilisé dans les relations inter-entreprises aux fins de garantir les prêts d’argent, ainsi que les baux commerciaux ou les mises à disposition de matériels. Ainsi de nombreuses sociétés belges créancières en France sont tentées de garantir leur créances par un cautionnement, lequel sera alors soumis au droit français.


Cependant, s’agissant des prêts d’argent garantis par un cautionnement, la jurisprudence française a eu tendance à vider de son sens cette sûreté, en étendant le régime très protecteur du droit de la consommation, dont les dispositions ont pour objectif de permettre l’information de la caution sur la portée de son engagement.


En effet, si initialement le Code de la consommation n’avait vocation qu’à régir les relations entre un établissement bancaire et une caution personne physique, dans le cadre d’un prêt à la consommation, la jurisprudence a eu tendance à appliquer ses dispositions à tous types de prêts d’argent, en ce compris les prêts accordés à des sociétés et garantis par la caution de leur gérant ou représentant légal.


Le régime des sûretés issu du Code de la consommation impose notamment un formalisme à peine de nullité du cautionnement. Ainsi, des mentions manuscrites doivent figurer impérativement dans l’acte de cautionnement, notamment : " En me portant caution de X., dans la limite de la somme de X couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard et pour la durée de X ans., je mengage à rembourser au prêteur les sommes dues sur mes revenus et mes biens si X. ny satisfait pas lui-même. " »


Du fait de l’évolution de la jurisprudence, un gérant de société caution, peut désormais se prévaloir de ce dispositif protecteur. Ainsi, la Cour de cassation a annulé le cautionnement d’un dirigeant de société en raison de la présence d’une accumulation d’irrégularités dans la mention manuscrite qui constituait une méconnaissance des obligations légales affectant le sens et la portée des mentions manuscrites.


Et ceci quand bien même il pourrait être considéré comme une caution avertie, à même de comprendre la portée de son engagement du fait qu’il est aguerri aux affaires, et peu important qu’il ait eu ou non un intérêt dans l’octroi du prêt.


Le cautionnement du dirigeant social ne conservera sa validité que s’il n’est entaché que d’erreurs matérielles ne portant pas atteinte à la compréhension de la teneur de l’engagement de la caution


La caution personne physique peut également se prévaloir du principe général de proportionnalité posé par l’article le Code de la consommation.


La Cour de cassation est venue préciser le principe de proportionnalité en ces termes : la disproportion manifeste du cautionnement aux biens et revenus de la caution au jour où il a été souscrit « suppose que la caution se trouve, lorsqu’elle le souscrit, dans l’impossibilité manifeste de faire face à un tel engagement avec ses biens et revenus » (Cass. Comm, 28.02.2018).


La Cour, faisant une stricte application du texte du Code de la consommation exige donc une impossibilité de faire face à l’engagement de caution souscrit, et non plus une simple difficulté de le faire. Ainsi le fait de constater un état d’endettement de la caution au moment de la conclusion du cautionnement sans rapporter la preuve que cela l’empêchait de garantir la créance était considéré comme une simple difficulté.


Cela suppose qu’avant la conclusion de l’acte de cautionnement, le créancier vérifie les capacités financières de la caution, et conserve la preuve de cette vérification.


De plus, par un autre arrêt du même jour, la Cour de cassation s’est montrée également très rigoureuse à l’égard d’une caution : un dirigeant d’une société s’est porté caution solidaire de l’ensemble des engagements présents et à venir de la société, vis-à-vis d’une banque, pendant dix ans, et dans la limite de 74.100, 00 €. La société dont il s’est porté caution a, par la suite, absorbé deux autres sociétés, qui avaient elles-mêmes souscrits des prêts auprès de la même banque. La banque a mis en œuvre l’exigibilité anticipée des prêts du fait de la fusion. La caution contestait alors être engagée au titre des prêts des deux sociétés absorbées. La Cour de cassation considère que la caution est engagée au titre des engagements présents et futurs de la société absorbante puisque les prêts des sociétés absorbées avaient été transmis à la société absorbante du fait de la fusion et de la transmission universelle du patrimoine qu’elle implique (Cass. Comm, 28.02.2018)


Ces deux arrêts ont tendance à rééquilibrer le régime du droit des sûretés en faveur des créanciers. Ils supposent cependant que les cautions aient été valables du point de vue du formalisme et du principe de proportion.


Une parade pour échapper au régime du droit des sûretés et de son rigorisme issu du Code de la consommation est de faire souscrire un contrat de cautionnement par une société.


Le régime du Code de la consommation est en effet inapplicable aux personnes morales, le Code de la consommation visant en qualité de caution « Toute personne physique ».


A cet égard, il est courant de rencontrer des cautionnements souscrits par des sociétés civiles immobilières (SCI). Ainsi, un gérant d’une société commerciale, qui est par ailleurs gérant ou associé d’une SCI, peut être tenté de faire cautionner le prêt accordé à la société commerciale par la SCI. Cette caution peut dans ce cas être hypothécaire, à savoir que la SCI affectera en hypothèque le ou les immeubles dont elle est propriétaire.


Or, il convient d’être prudent car pour être valable, le cautionnement de la SCI doit être autorisé par l’ensemble des associés de la SCI et doit être conforme à l’objet social. En cas de non-conformité à l’objet social, ou en cas de contrariété à l’intérêt social (si la dette est trop importante par rapport à la valeur du ou des immeubles détenus par la SCI), le cautionnement de la SCI encourra la nullité (Cass. Comm, 18.10.2017 : nullité du cautionnement d’une SCI pour contrariété à son objet social)!


La sécurité juridique du cautionnement du point de vue du créancier réside donc dans le fait de garantir sa créance par un cautionnement constitué par une société commerciale à laquelle le droit de la consommation n’est pas applicable.


Si le créancier d’un prêt d’argent ne peut obtenir un cautionnement que de la part d’une personne physique, il conviendra alors, afin de parer à toute difficulté future éventuelle, compte-tenu de la jurisprudence en vigueur en France, de faire établir le cautionnement par acte authentique devant notaire. En effet, la jurisprudence de la Cour de cassation a encore récemment affirmé que les règles de formalisme prescrites par le code de la consommation en matière de cautionnement sont écartées lorsque l’acte a été établi en la forme authentique. Cette solution découle du Code de la consommation qui ne vise que l’acte sous seing privé.


Dans la mesure où de nombreuses sociétés belges créancières en France, en vertu d’un prêt d’argent, sont tentées de garantir leur créance par un cautionnement, qui sera alors soumis au droit français, il convient de veiller aux nullités que peut encourir le cautionnement du fait du code de la consommation. Pour éviter ces nullités, une caution donnée par une société commerciale sera préférée à une caution donnée par une personne physique ou par une société civile. De plus, pour le cas où la caution est une personne physique, il conviendra de faire établir le cautionnement par acte authentique devant notaire.